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Rodrigues: Going Further
Vers plus loin
byKiki Müller
After spending eleven hours on a plane and landing at one of the world’s most famous beach destinations—why keep going? Precisely because almost no one does.
Quand on atterrit à l’île Maurice, l’une des destinations balnéaires les plus prisées au monde, pourquoi continuer plus loin ? Justement, parce que presque personne ne le fait.

The secret to escaping the crowds isn’t really a secret at all: with every new leg of the journey, fellow travellers fall away. And if the route happens to pass through world-famous dream destinations—all the better. My flight to Port Louis, the capital of Mauritius, was packed: hundreds of sun-seeking Europeans, chasing a tropical escape complete with Western comforts to soothe the strains of daily life. But hardly any of them had likely heard of the tiny island that made me leave Mauritius shortly after I arrived: Rodrigues. Remote, little-known, and so, so beautiful.

When Portuguese explorer Diogo Rodrigues first set foot on the island in 1528, he found it uninhabited—which it would stay until the early 18th century. Rodrigues was simply too far south and too far east of the bustling trade routes that connected East Africa with Arabia and Asia to spark much interest from the outside world. For decades, the island served little more than a practical purpose: a quick stop to refill water and food supplies. Today, Rodrigues is home to around 50000 people. And its location—too far east, too far south—continues to define its character to this day.

Le secret pour échapper au tourisme de masse n’en est pas vraiment un : à chaque nouvelle étape, on laisse des voyageurs derrière soi. Si l’itinéraire passe par une destination de rêve connue du monde entier, c’est encore mieux. Mon avion pour Port Louis, la capitale de l’île Maurice, était rempli de touristes avides de soleil et d’évasion, désireux de se reposer sans toutefois renoncer à leurs standards européens. Peu d’entre eux avaient entendu parler de la petite île pour laquelle je quittai Maurice peu après mon arrivée : Rodrigues. Isolée, méconnue — et d’une beauté saisissante.

Alors que la République de Maurice, dont Rodrigues fait partie depuis 1968, a attiré à elle seule près de 1,3 million de touristes internationaux en 2023, Rodrigues en a accueilli moins de 100000. La grande majorité d’entre eux sont des Mauriciennes et des Mauriciens qui rendent visite à leur famille ou souhaitent échapper, l’espace de quelques jours, à l’agitation touristique de l’île principale. Les autres viennent, pour la plupart, de l’île voisine de La Réunion — la seule autre destination à proposer actuellement un vol direct vers Rodrigues. Parmi les rares voyageuses et voyageurs venus du reste du monde, le sujet de conversation numéro un est de savoir comment on a entendu parler de l’île.

While Mauritius, of which Rodrigues has officially been a part since 1968, welcomed around 1.3 million international tourists in 2023, Rodrigues saw fewer than 100000. And the overwhelming majority of those weren’t foreign tourists at all, but Mauritians, coming to visit family or to escape the busy, tourist-heavy main island for a few days of downtime. Most of the remaining travellers arrive from nearby La Réunion, the only other place currently offering direct flights to Rodrigues. Among the few visitors from the rest of the world, one question dominates every conversation: how on earth did you even hear about this place?

Lorsque le navigateur portugais Diogo Rodrigues — officiellement le premier à l’avoir découverte — débarqua sur l’île en 1528, elle était inhabitée et le resterait jusqu’au début du XVIIIe siècle. Trop au sud, trop à l’est des grandes routes commerciales reliant l’Afrique à l’Arabie et à l’Asie, elle suscitait peu d’intérêt. Pendant des décennies, Rodrigues ne servit que de point de ravitaillement en eau et en vivres lors de brèves escales. Aujourd’hui, l’île abrite près de 50 000 habitants, mais reste encore définie par sa position géographique : trop à l’est, trop au sud, trop isolée au cœur de l’océan Indien.

That something so beautiful remains so unknown is largely because Rodrigues itself has never really tried to do anything about it. It fits the island’s spirit perfectly: people prefer to let things unfold naturally, to be discovered rather than advertised. Only at the start of this year did Rodrigues see its first international hotel group arrive. Constance, a Mauritian company, took over two ageing resorts, reopening them as Constance Tekoma and C Rodrigues Mourouk—upgraded to meet Western standards, yet preserving the island’s effortless charm and warm, open-hearted atmosphere.

Que quelque chose d’aussi beau reste aussi méconnu tient en grande partie au fait que Rodrigues n’a jamais vraiment cherché à y remédier. Cela correspond parfaitement à l’esprit de l’île : les habitants préfèrent laisser les choses se faire naturellement, être découvertes plutôt que mises en avant. Ce n’est qu’au début de cette année que Rodrigues a vu arriver sa première chaîne hôtelière internationale. Constance, une entreprise mauricienne, a repris deux complexes vieillissants et les a rouverts sous les noms de Constance Tekoma et C Rodrigues Mourouk — modernisés selon les standards occidentaux, tout en préservant le charme naturel de l’île et son atmosphère accueillante et conviviale.

Because that’s just who the people of Rodrigues are: easygoing, cheerful, and genuinely content. This is their island, their paradise. Anyone who wanted more left Rodrigues long ago. Those who stayed know that, right here, they have everything they need. Rodrigues is one of those rare, wonderful places—and there aren’t many left—where there is really nothing to do, and yet you never feel bored. You just fall into the island’s rhythm and start to enjoy a life defined by abundance—not of things, but of space, time, and ease. 

Parce que c’est tout simplement dans la nature des habitants de Rodrigues : décontractés, joyeux et vraiment satisfaits. C’est leur île, leur paradis. Ceux qui voulaient plus sont partis depuis longtemps. Ceux qui sont restés savent qu’ici, ils ont tout ce dont ils ont besoin. Rodrigues fait partie de ces rares et merveilleux endroits — et il n’en reste pas beaucoup — où il n’y a vraiment rien à faire, et pourtant on ne s’y ennuie jamais. On se laisse simplement porter par le rythme de l’île et on commence à savourer une vie définie par l’abondance — non pas de choses, mais d’espace, de temps et de sérénité.

I stay for five days, five blissful days of detox and discovery, if you will. They take me all over this island of untamed beauty—across rolling hills and along the coastline, through dry scrub and lush tropical forests. I snorkel in the coral reefs, hike along rocky cliffs, and eat papayas by the roadside. I bathe in crystal-clear waters, watch kitesurfers skim across the waves, and race down a zipline with a view of the ocean, soaring over deep ravines. I wander through the capital, Port Mathurin, visit the market, chat with the locals, and let them, more to their entertainment than to mine, teach me a bit of Creole. And I often sit on the soft white sand, gazing out at the sea, the kind of doing nothing that feels like everything.

Being here feels like a journey back to a time I only faintly remember. A time when beaches weren’t reserved exclusively for hotel guests, a time before forests were cleared to make way for golf and tennis courts, before traditional dances were performed only for the sake of tourists. It’s a return to the world as it once was, a world we often wish still existed. It’s a small patch of earth you want to send everyone to—but, at the same time, want to keep all to yourself.

Je reste cinq jours – cinq jours de bonheur pur, de détox et de découverte. Je parcours cette île de beauté sauvage, à travers des collines ondulantes et le long de la côte, à travers des buissons secs et des forêts tropicales luxuriantes. Je fais du snorkeling dans les récifs coralliens, je randonne le long de falaises rocheuses, je mange des papayes au bord de la route. Je me baigne dans des eaux cristallines, je regarde les kitesurfeurs glisser sur les vagues, et je dévale une tyrolienne avec vue sur l’océan, survolant de profondes ravines. Je me promène dans la capitale, Port Mathurin, visite le marché, discute avec les habitants, et les laisse, plus pour leur amusement que pour le mien, m’apprendre quelques mots de créole. Et souvent, je m’assois sur le sable doux et blanc, en regardant la mer, cette forme de ne rien faire qui en réalité semble être tout.

Être ici, c’est comme un voyage dans le temps, vers une époque dont je ne me souviens que vaguement. Une époque où les plages n’étaient pas réservées exclusivement aux clients des hôtels, une époque avant que les forêts ne soient défrichées pour faire place à des terrains de golf et des courts de tennis, avant que les danses traditionnelles ne soient exécutées uniquement pour le plaisir des touristes. C’est un retour à un monde tel qu’il était autrefois, un monde que l’on souhaite souvent voir perdurer. C’est un petit coin de terre que l’on voudrait faire découvrir à tout le monde — mais en même temps, que l’on veut garder pour soi.